La tutelle et les autres mesures judiciaires de protection pour majeurs
Un cas d'exemple de tutelle de personne âgée
Monsieur et Madame X.
sont originaires de la région parisienne. Ils ont décidé de venir s’installer sur la côte atlantique à leur retraite. Ils habitent une belle villa qu’ils ont fait construire dans un quartier résidentiel. Actuellement Madame X. est âgée de 85ans, elle est veuve depuis 5 ans et continue de vivre seule à son domicile. En janvier, Madame X. a fait une chute, elle est restée toute la nuit allongée sur le parquet de sa chambre à l’étage et n’a pas pu se relever.
La factrice a informé les pompiers en voyant les volets fermés. Hospitalisée aux urgences, Madame X. a été orientée vers un service d’orthopédie car une fracture du fémur droit a été diagnostiquée.
Le fils unique de Madame X., Cadre Supérieur d’une entreprise informatique, était en déplacement au Texas et a été informé difficilement de cet accident. Monsieur X. est divorcé depuis 15 ans, père de trois filles dont deux sont mariées et habitent à Lille et à Strasbourg .Seule la troisième petite fille a pu se déplacer de Paris pour rendre visite à sa grand-mère au cours de son hospitalisation. Elle l’a appelée du prénom de son ex belle-fille avec qui ses rapports étaient bien sûr fort distants depuis le divorce.
Après un séjour de deux mois en rééducation, Madame X. a récupéré une certaine autonomie et a pu rejoindre son domicile grâce à la présence d’une aide ménagère qui intervient pour le ménage et les courses. La petite fille de Madame X. n’a pas pu rester très longtemps au chevet de sa grand-mère en raison d’examens universitaires à présenter.
Cette année le fils de Madame X. passe quelques jours auprès de sa mère en rentrant de ces congés en Espagne. Il souhaite lui présenter sa nouvelle compagne. Madame X. se lève plusieurs fois la nuit, et parait bien fatiguée le jour. Son fils remarque que la prise de son traitement est fantaisiste avec une double prise ou des oublis. Madame X. a également l’habitude de donner des chèques signés à son aide ménagère pour la pharmacie, pour l’épicerie, et tous les achats ordinaires. Sur le meuble de l’entrée s’accumule le courrier dont des relevés bancaires depuis de nombreux mois.
Au cours des repas, la compagne de Monsieur X. remarque que Madame X. a gardé les mêmes vêtements depuis leur arrivée; ceux-ci ne sont pas nets, l’hygiène de Madame X. qui était coquette n’est plus entretenue.
Un après midi, Madame X. se lève après une sieste et semble tout à fait désorientée. Le médecin de famille est contacté . Monsieur X. comprend qu’il lui faut mettre en place
une mesure de protection pour sa mère.
Les mesures de protection à envisager qui lui sont expliquées sont les suivantes:
- La tutelle (définition) est une mesure judiciaire destinée à protéger une personne majeure si elle n'est plus en état de veiller sur ses propres intérêts, grâce à l'aide d'un tuteur qui peut la représenter dans les actes de la vie civile.
- Les personnes majeures ayant besoin d'être représentées de manière continue dans les actes de la vie civile, du fait de l'altération de leurs facultés mentales, ou lorsque leurs facultés corporelles sont altérées au point d’empêcher l’expression de leur volonté, et pour qui toute autre mesure de protection moins contraignante (curatelle, sauvegarde de justice) serait insuffisante.
- Pour être valable, toute demande d'ouverture de mesure de tutelle doit être obligatoirement accompagnée d'un certificat médical rédigé par un médecin expert inscrit sur une liste établie par le procureur de la République, qui établit l'altération des facultés de la personne.
- Le certificat décrit l'altération des facultés du majeur et donne tout élément sur son évolution prévisible. Il précise les conséquences de cette altération sur la nécessité pour le majeur d'être assisté ou représenté, et indique si la personne est en état d'être auditionnée. Ce certificat précise également l’avis du médecin sur la nécessité ou non de supprimer le droit de vote de la personne protégée.
Demande au juge des tutelles
L'ouverture d'une mesure de tutelle peut être demandée au
juge des tutelles par la personne à protéger elle-même, son conjoint, le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité (sauf en cas de rupture de la vie commune), un membre de sa famille, la personne en charge de sa protection, d'autres proches entretenant des relations étroites et stables avec elle.
Il peut s’agir du
procureur de la République, qui formule cette demande soit d'office, soit à la demande d'un tiers (par exemple : médecin, directeur d'établissement de santé, travailleur social).
La demande doit comporter, outre le certificat médical, l’identité de la personne à protéger et l’énoncé des faits qui appellent cette protection.
Elle est adressée au
juge des tutelles dont dépend le lieu de résidence du majeur à protéger.
Le
tuteur est nommé par le juge des tutelles. Il a la possibilité de nommer plusieurs tuteurs, notamment pour diviser la mesure de protection entre la protection de la personne et la gestion patrimoniale.
Le juge peut désigner un
mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur une liste dressée et tenue à jour par le préfet si aucune personne de l’entourage ne peut être nommée tuteur.
Le tuteur est tenu de rendre compte de l'exécution de son mandat à la personne protégée et au juge.
Le tuteur peut prendre les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, le majeur ferait courir à lui-même. Il en informe le juge.
Le juge des tutelles fixe la durée de la mesure de tutelle, qui ne peut excéder 5 ans.
Le juge peut décider de la renouveler pour une durée plus longue si l'altération des facultés du majeur protégé apparaît irrémédiable, sur avis conforme du médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République.
Le juge des tutelles peut alléger la mesure à tout moment.
Curatelle, sauvegarde de justice
Elle s'applique à des personnes qui, sans être totalement incapables, nécessitent d'être assistées dans les actes de la vie civile. Ce régime s'applique à des personnes qui, sans être hors d'état d'agir elles-mêmes, ont besoin d'être assistées, conseillées ou contrôlées dans les actes de la vie civile.
Un curateur ou
gérant de tutelle est alors désigné à cet effet par
le juge des tutelles.
Le degré de protection de la curatelle est inférieur à celui d'une tutelle.
La curatelle est une formule qui permet d'assurer la protection juridique de personnes susceptibles d'accomplir des actes qui peuvent leur être préjudiciables.
La curatelle doit être mise en place lorsqu'une personne, du fait de son état de santé, physique ou mental, ne se trouve plus en pleine possession de ses moyens, sans toutefois être hors d'état d'agir par elle-même.
Les personnes concernées sont celles dont les facultés mentales sont altérées par une maladie, une infirmité ou un affaiblissement dû à l'âge ou dont l'altération des capacités physiques empêchent l'expression de la volonté. L'altération doit être établie par un « certificat médical circonstancié » donné par un médecin spécialiste reconnu et inscrit sur une liste tenue à jour par le Procureur de la République.
En résumé: la Protection Juridique, la Tutelle et la Curatelle
La loi du 5 Mars 2007 portant réforme de la protection juridique de majeurs (n°2007-308) met la personne vulnérable au cœur du dispositif de protection. La législation actuelle concernant
tutelle et curatelle instaure un dispositif d'accompagnement social afin de répondre à ce besoin de protection qui ne nécessite pas une restriction de droit. Les changements concernent la durée déterminée des mesures, l'obligation de réviser la mesure, la place centrale de la volonté de la personne à protéger, le contrôle des comptes.
Budget de la tutelle
Il est arrêté par le
juge des tutelles ou le
conseil de famille sur proposition du
tuteur(article 500 du code civil). Ce dernier doit présenter au juge une requête, accompagnée des pièces justificatives, dans laquelle il détaille les sommes qui sont nécessaires pour une année, à l'entretien de la personne protégée et au remboursement des frais d'administration de ses biens. Ce budget doit être adapté en fonction de l'évolution de la situation de la personne protégée. Cette disposition doit permettre tant au juge qu'au tuteur de mesurer, dès le début de la protection, la répartition des revenus entre, d'une part, le règlement des charges fixes, incompressibles, mais aussi prévisibles du majeur (loisirs, vacances...), et d'autre part, celles laissées sur un compte indisponible ou au contraire à la libre disposition du majeur.